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Tempi passati
2 août 2014

La dernière lettre

couverture

Je suis une fois de plus tombé par hasard sur cette brochure des éditions "Librio" dans sa collection "Documents", dirigée par Jean-Pierre Guéno. Déjà la page de couverture me donnait l'intuition de ce que renfermeraient ces 125 pages; mais lorsque le feuilletant, je lisais le début de la lettre qui suit et dont l'auteur n'est autre que le gamin figurant en page de couverture, je dû m'accrocher au présentoir et reprendre mon souffle coupé par l'émotion.

Je n'en dis pas plus et vous conseille ce petit opuscule, vibrant hommage, à tous ceux qui ont vécu les terribles semaines du débarquement mais bien évidemment de tout le conflit de 39-45. 

On  devrait non seulement le mettre sous les yeux et le faire commenter en classe aux élèves du primaire au baccalauréat aujourd'hui, pour leur montrer quels privilégiés ils sont et à qui ils le doivent mais aussi aux intégristes tant israéliens si fort à jouer de la détente des armes à feu que de leurs opposants intégristes eux-mêmes. Toute cette clique d'individus sans scrupules qui veulent nous faire croire aux balivernes de leurs religions respectives pour justifier leur sanglantes menées depuis des siècles. Tous ces apôtres du oeil pour oeil, dent pour dent, qui 70 ans après ont déjà tout oublié et non toujours rien compris.

Voici le texte:

17-18-19 août 1942

Chers Papa et Maman,

Il y a quelques minutes, nous avons été rassemblés pour aller nous battre. Même si j'ai crié <> comme les autres du peloton, je ne me sens pas très brave, mais soyez assurés que je ne serai jamais une cause de déshonneur pour le nom de la famille.

Dans l'endroit où nous sommes, en ce moment, notre colonel, Dollard Ménard, nous a annoncé I 'endroit où nous irons attaquer l'ennemi.

Notre aumônier, padre Sabourin, rassemble tous ceux qui veulent recevoir l'absolution générale, ainsi que la sainte communion. Presque tous répondent à t'appel. le veux être en paix avec Dieu, au cas où quelque chose m'arrive. Nous sommes invités à participer à un somptueux repas. Nous sommes servis par les membres féminins auxiliaires de la Marine royale. Les tables sont recouvertes de nappes blanches et chacun a son couvert complet. Il y a bien longtemps que nous avons été traités de la sorte par le service militaire. Je continue ma lettre à bord de notre péniche d'assaut. Nous sommes chanceux, car la mer est très calme, le temps est au beau. L'engagement avec l'ennemi prendra place vers 5h30. Certains racontent des blagues; on devine la tension qui existe; je la ressens moi-même. La lune nous éclaire suffisamment pour que je puisse continuer.

Il y a deux heures et demie que nous naviguons, et je dois faire vite avant la nuit noire. j'en profite pour vous demander pardon pour toute la peine que j'ai pu vous causer, surtout lors de mon enrôlement.

Si je reviens vivant de cette aventure, et si je retourne à la maison, à la fin de la guerre, je ferai tout ce que je pourrai pour sécher tes larmes, Maman, je ferai tout en mon pouvoir afin de vous faire oublier toutes les angoisses dont je suis la cause.

J'espère que vous aurez reçu ma lettre de la semaine passée; j'ai célébré mon dix-huitième anniversaire le 13, et je sais que je n'ai pas raison d'aller combattre. Mais lorsque vous apprendrez avec quelle bravoure je me serai battu, vous me pardonnerez toutes les peines que je vous aurai causées.

L'aurore pointe déjà à l'horizon, mais durant la nuit, j'ai récité toutes les prières que vous m'avez enseignées, et avec plus de ferveur qu'à l'habitude.

Il y a quelques minutes, j'ai cru que nous étions déjà entrés en action avec les Allemands. Là-bas sur notre gauche, le grondement de canons avec le ciel qui était éclairé nous l'a fait croire. Il fait beaucoup plus clair maintenant, et je peux mieux voir ce que j'écris; j'espère que vous pourrez me lire. L'on nous avertit que nous sommes très près de la côte française. je le crois, car nous entendons la canonnade ainsi que les bruits des explosions, même le sifflement des obus passant au-dessus de nos têtes. Je réalise enfin que nous ne sommes plus à l'exercice. Une péniche d'assaut directement à côté de la nôtre vient d'être atteinte, et elle s'est désintégrée avec tous ceux qui étaient à son bord. Nous n'avons pas eu le temps de voir grand chose, car en l'espace d'une ou deux minutes, il n'y avait plus rien.

Ô mon Dieu, protégez-nous d'un pareil sort! Tant de camarades et amis qui étaient là voilà deux minutes sont disparus pour toujours. C'est horrible. D'autres embarcations de notre groupe ainsi que d'autres groupes ont été touchées, et ont subi le même sort. Si je

devais être parmi les victimes, Jacques vous apprendra ce qui m'est arrivé, car nous avons fait la promesse de le faire, pour l'un ou l'autre, au cas où l'un de nous ne reviendrait pas. le vous aime bien, et dites à mes frères et sœurs que je les aime bien aussi du cœur.

Robert Boulanger 

Le  jeune Robert participait ce jour là à la tentative de débarquement de Dieppe qui fut une catastrophe faisant autant de victimes chez les alliés, sinon plus, que l'arrivée sur Omaha Beach 2 ans plus tard compte tenu des effectifs mis en place. Il fut tué d'une balle en pleine tête en débarquant sur la plage...

On trouve dans ce texte à la syntaxe et à la langue parfaite, cette candeur de la jeunesse d'un garçon qui n'est pas encore tout à fait devenu un homme et qui navigue dans la cour des grands, de grands totalement irresponsables dans les deux camps.

En effet et à juste titre Guéno commence le premier chapitre en rappelant "...Les hommes de la vieille Europe avaient semé le vent à l'orée du siècle. . .Ils avaient déclenché la tempête d'une guerre dont personne n'arriverait jamais à trouver Ia raison logique. Ils avaient enfoui par millions dans la terre grasse de leurs plaines et de leurs vallées les corps meurtris de leurs enfants. Et puis quand était venu Ie dernier automne de cette grande boucherie, après que les tranchées se furent tues, peut-être pour apaiser la douleur des veuves et des orphelins, il avait bien fallu désigner un responsable... L'Allemagne avait été mise au ban des nations; elle avait été mise en demeure de payer à elle seule le prix du drame qui venait de déchirer les enfants lointains de Charlemagne... Le camp des vainqueurs allait humilier Ie camp des vaincus. La guerre allait continuer; migrant de la glaise des tranchées vers celle de l'économie... La haine allait continuer à faire germer la haine. Dans les soubresauts de la grande crise, un peuple allait achever de perdre son honneur et sa dignité, jusqu'à ce degré du désespoir et de la misère où les foules égarées pensent n'avoir plus rien à perdre. Jusqu'à ce que vienne Adolf Hitler.

II allait faire fleurir les croix gammées, les défilés militaires, les bras tendus, les charniers, Ies rafles, les étoiles jaunes, les barbelés et les miradors..."

On ne saurait mieux montrer du doigt les responsables de la seconde guerre mondiale. Ce n'est pas seulement l'attaquant qui le fut, mais ce sont les attaqués en premier qui ont et garderont toujours sur leur conscience de génération en génération la responsabilité totale de ce conflit qui fit tant de victimes. Aujourd'hui ce sont les Israéliens, Palestiniens, intégristes de tous bords qui aujourd'hui encore poursuivent leurs querelles d'imbéciles, et sont aussi irresponsables et montrent à quel point ils n'ont pas compris la leçon dont leurs familles décimées ont été les victimes.

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