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Tempi passati
22 janvier 2016

Le journal de Berlin de William L. Shirer

Je viens de commencer la seconde partie du journal tenu par William Shirer entre 1944 et 1947 lorsqu'il retourna en Allemagne à la fin de la seconde guerre mondiale.

Une fois de plus ce grand journaliste réussit à m'émouvoir à un point difficilement imaginable. Cet homme avait le don pour écrire simplement et vous faire revivre comme si vous étiez à coté de lui les événements majeurs de cette période. En voici quelques passages significatifs:

"New York, mercredi 23 aout:

Paris la gloire de la France comme disait Montaigne, est libre..."

plus loin, il est arrivé en Europe le 6 Octobre à bord du Queen Mary:

"Paris, 19 octobre 1944.

Enfin!

Comme Paris est différent depuis la dernière fois où je l'ai vu en ces tragiques journées de Juin 1940 et comme tout cela semble loin..Les rues et les boulevards étaient alors déserts, les volets clos, magasins, boutiques, cafés, bistros étaient fermés derrière leurs rideaux de fer. Les rues appartenaient aux arrogants Prussiens [le mot anglais a plus de force que le mot français car il fait retentir par ses conssonnances le martélement des bottes sur les pavés- "Strutting Prussians". Le redoublement de la consonne T raccourcit le vocable comme un coup sec sur le sol].

Aujourd'hui cette peste est partie! Les rues sont animées pleines de français s'afférant à leurs occupations, enfin libres et buvant et jouissant de leur liberté retrouvée "

Puis quelques jours plus tard, Il assiste aux cérémonies du 11 Novembre 1944 à Paris, De Gaulle défile en compagnie de Churchill dont on avait caché la venue de peur de tentatives d'attentats Allemands,  et Shirer se rend ensuite à Compiègne où en Juin 1940 il fut le premier journaliste américain à retransmettre en direct à la radio pour CBS, la sinistre cérémonie de l'armistice demandé par "....les perfides Pétain et Laval...". Il nous décrit le site en cette fin 1944, le wagon où fut signé l'armistice de 1918 et celui de 1940 vengeance suprême d'Hitler, n'est plus là; transféré à Berlin il fut détruit par une bombe alliée,

" sans doute [dit-il] je me plais à le penser, les teutons superstitieux y ont vu un présage de leur destruction. Dès lors leur victoire qui semblait si évidente commençait à s'évanouir..."

Ce 11 novembre 1944 est présent Jules Jeanneney président du sénat en 1940 qui refusât de participer à la signature en 1940 et de suivre le régime de Vichy. Shirer nous décrit en des mots tout simples,

"...le site vide où seule subsiste la statue du Maréchal Foch épargnée l'on  ne sait trop pourquoi par la rage destructrice des "Huns."...3.

Tout le reste du site a été dynamité, l'herbe pousse là où se trouvait la stèle et le monument en l'honneur de l'Alsace Lorraine.

".... Le soleil se couche quand soudain 9 jeunes de la résistance viennent en petites foulées,  en short et en chemise, tenant une torche. Elle a été allumée à 11h précises  devant la tombe du soldat inconnu sous l'Arc de Triomphe et amenée par des coureurs se relayant depuis Paris tout au long des 90 kms qui séparent les deux sites. On a reconstitué provisoirement le monument détruit commémorant l'armistice de 1918 et portant  l'inscription rédigée par Binet-Valmer : « Ici le 11 novembre 1918 succomba le criminel orgueil de l'empire allemand vaincu par les peuples libres qu'il prétendait asservir ». Des brasiers sont allumés avec la torche....

...Je peux enfin relire l'inscription que la pénombre rendait illisible et que le soldat américain m'empêchait d'approcher. Comment pourriez vous faire comprendre ce que cela signifiait à une tête vide de soldat policier [ MP= Military Police]? La clairière s'est embrasée. Personne ne parle, le silence est impressionnant néanmoins des discours vont être prononcés; "partons" dis-je à Sonia qui m'accompagne...Nous nous éloignons dans la pénombre et rentrons à Paris..."

Tout William Shirer est résumé dans ces quelques phrases de cet homme hypersensible qui vouait un véritable culte à Paris et à la France qu'il considérait comme sa seconde patrie.

Bien des journalistes aujourd'hui feraient bien de prendre exemple sur lui et ce livre qui a été traduit en Français mérite d'être lu et relu. C'est du pris sur le vif, du vécu, écrit sans fard.

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