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Tempi passati
30 juillet 2023

La France:Médecine en déroute

Après de longues hésitations je viens de rompre les ponts avec mon cardiologue. Depuis sept ans j’étais suivi à la Salpètrière par le cardiologue qui m’avait installé mes 5 stents au moment de mon infarctus. Je lui dois d’être vivant et le lui ai fait savoir et exprimé toute ma reconnaissance.

Est-ce à dire que je dois tout accepter ?

Non !

Que cela plaise ou pas à nombre de médecins qu’ils soient généralistes ou spécialistes, la compétence strictement technique, les connaissances stricto sensu ne suffisent pas dans l’exercice d’un tel métier.

Le patient en bonne santé relative ou pas est un être fragile face à la blouse blanche. Son entourage familial, professionnel ou amical si présent soit-il ne suffira jamais à le rassurer sur son état de santé et cette angoisse avouée ou non s’amplifiera dès lors qu’une maladie viendra perturber le cours de son existence quotidienne.

Nous patients ne sommes ni des numéros de dossier, ni des objets, des machines sophistiquées auxquelles on branche des instruments de mesure, des appareillages de régulations ou de déversements de fluides en remplacement de ceux déclarés défectueux.

Nous sommes des êtres humains qui ont besoin d’être rassurés en permanence, car braves ou non, vantards ou non, nous devrons faire face à une inconnue majeure en cas de maladie, notre disparition, la mort. Un vide irrémédiable, une inconnue que certains ont la chance de pouvoir combler par la croyance à une mystique.

En prime s’ajoute la situation dans laquelle nous nous trouvons au plan familial, professionnel, amical qui peut détériorer notre capacité à affronter une telle inconnue.

Alors nous devons trouver chez le praticien spécialiste ou non un peu de chaleur, d’encouragement, d’intérêt pour ce que nous sommes ou vivons quotidiennement.

Personne ne niera le fait que le médecin doit s’endurcir car lui aussi doit faire face à la même inconnue et au risque d’échec devant la maladie si compétent soit-il. Mais cela ne doit pas en faire un être insensible, dépourvu de psychologie et d’empathie pour son patient.

L’évolution de la médecine au plan non seulement des connaissances mais encore plus des technologies des moyens d’investigation, ont eu et ont toujours une tendance fâcheuse à faire oublier cet élément essentiel du rapport patient praticien.

Ajoutons à cela la super spécialisation, le refus quasi systématique de ceux qui décident d’appartenir au corps médical, de considérer cette profession comme un véritable sacerdoce.

Qui en fait les frais ? Le patient.

Fini le médecin de ville se déplaçant chez son patient, qui connaissait votre famille et son histoire sur quasiment le bout des doigts, qui n’hésitait pas à venir à n’importe quelle heure à votre chevet y compris la nuit et le week end.

En cas d’urgence vous serez face à un inconnu ; si professionnel soit-il ce sera toujours un inconnu avec qui vous ne pourrez pas réellement communiquer ; si vous voulez le remercier plus tard d’avoir contribué à vous avoir sauver la vie, vous ne pourrez pas le faire car non seulement vous n’avez pas son nom et ses coordonnées, mais les sites internet du SAMU ou autres organismes urgentistes ne vous donnent aucun moyen de le faire.

En février 2017 je fus confronté à cette situation. J’ai voulu exprimer ma reconnaissance au médecin du SAMU et son équipe qui ont contribué par leur action à me sauver la vie. Deux arrêts cardiaques pendant le transport à l’hôpital. J’ai envoyé un mail une fois de retour chez moi trois mois plus tard. Qui l’a reçu, n’est-il pas aller dans une boite poubelle comme cela existe trop souvent dans les sociétés ou organismes publics ou pas ?

Si j’ai été remarquablement suivi et soigné à l’hôpital, il n’empêche que certains se sont comportés de façon inadmissible :

Cet interne s’asseyant sur ma sonde urinaire et ne s’excusant pas de la douleur générée,

Cette cardiologue ayant l’arrogance de me dire que « vous devais être content, on vous a sauvé la vie » ! Je lui reprochais de m’avoir fait passer une nuit quasiment debout et angoissé pour ne pas m’avoir dit qu’elle augmentait ma dose de diurétique pour une raison certes valable, mais bon dieu j’ai le droit d’en être informé ! C’est mon corps, « cette guenille [qui] est d'une importance, d'un prix à mériter [seulement] qu'on y pense... »

Cette infirmière oubliant ma présence et disant à sa stagiaire qu’au-delà d’une certaine dose de potassium elle me tuerait ! Et la stagiaire ne sachant pas que répondre à la question de la dose  à ne pas dépasser ! Elle était entrain de régler le dosage à mettre dans la perfusion, se faisant par le biais d’un automate !

Une autre à qui je demandais gentiment de dire à ses collègues à 5-6h du matin de ne pas s’interpeller d’un bout du couloir (style sketche des « Inconnus ») à l’autre de penser que les patients voulaient se reposer même si nécessité il y a de venir prendre tôt température et tension artérielle.

Un autre cardiologue à qui je donnais des informations qui pourraient lui être utiles, ne m’écoutant pas et regardant un par un mes dvd sur ma table de chevet.

Le sommet de l’indifférence fut atteint il y a deux ans quand sans le moindre ménagement mon cardiologue me sortit que vu mon âge, 80 ans, un contrôle coronographique dans dix ans était inutile. Sous entendu il y a fort peu de chances que vous soyez encore de ce monde ! Je lui répondais sourire pincé qu’en effet ‘ « je sentirai le sapin ou la poussière » ! Inconscient de sa bourde, il répondit alors qu’un de ses patients de 95 ans « avait  les [artères] toutes bouchées mais était toujours vivant » !!!! Quel psychologue !

Si vous ajoutez à cela qu’en 7 ans et depuis quatre ans pas une seule fois il ne m’a ausculté, regarde de loin les analyses complètes annuelles qui ne sont pas faites à l’hôpital, et m’expédie en moins de 15-20 minutes, vous avez une idée de l’intérêt qu’il porte à son malade.

A contrario le rythmologue lui dans le même centre de cardiologie, à chaque rendez vous annuel trouve un gentil mot pour savoir comment vous allez, ce que vous avez fait récemment, cela prend cinq minutes et vous vous sentez devenu un être humain.

La cardiologie, le corps médical je connais et pour cause : je suis fils de médecin, de cardiologue qui plus est.

Cessons de mettre les effectifs comme cause de cette indifférence actuelle envers le patient. D’un coté jusqu’à Mai 68 vous aviez des praticiens pour qui la médecine était un sacerdoce, passionnés par leur métier, lisez une interview du Professeur Vacheron en 2012 « La cardiologie moderne : quand le mandarinat a du bon »  (source :site internet « destination santé »). Il dit : 

« En France, ce sont les grands patrons et leurs écoles qui ont fait avancer la cardiologie » assure-t-il. Il se désole toutefois, que ce système ait « quasiment disparu aujourd’hui. Cette institution remarquable dans laquelle il y avait un grand patron, des enfants patrons et des petits-enfants patrons n’existe plus. Ils se succédaient et formaient une école dans laquelle la discipline se développait », explique-t-il avec une pointe de nostalgie. Aujourd’hui donc, « on a morcelé les disciplines en créant des pôles, trop souvent hétérogènes. Charles Laubry puis ses disciples, Jean Lenègre et Pierre Soulié. Ensuite ils ont eux-mêmes formé des élèves. Car il n’y a pas de génération spontanée…».

Eh oui ! Laubry de qui mon père fut l’assistant, Soulié camarade de promotion et ami de mon père, il travailla auprès de Soulié à Broussais. Tous ont donné le meilleur d’eux-mêmes ainsi que les membres de leurs équipes, les Coronne, Chiche, Jean Di Matteo pour ne citer que ceux dont j’entendais les noms à la maison.

Ces médecins pour nombre d’entre eux ne faisaient pas la une de la presse quotidienne. Aujourd’hui ce serait la télévision. On ne les voyait pas dans les postes ministériels. On les voyait à votre chevet au moment de la dernière manche contre la maladie et vous tenant la main jusqu’à votre dernier soupir. Mon père rentrait démoli de ce qu’il considérait comme un échec malgré tous ses efforts. Il s’enfermait dans son bureau et rouvrait le dossier du patient pour être certain de ne pas avoir omis un détail qui aurait pu sauver la vie de son malade. Il était adoré de ses patients qui disaient en riant « pas moyen de cacher quoi que ce soit au docteur, il vous regarde mine de rien et cinq minutes après vous repose la même question sous une autre forme et vous vous prenez les pieds dans le tapis pour avoir tenté de cacher un faux pas et vous baissiez les yeux rougissant devant son regard bleu acier accompagné d’un sourire ironique… »

Alors oui docteur S…. je suis exigeant, et je ne tolère pas de devoir en 7 ans chaque année, avoir eu à vous demander de rectifier l’adresse de mon médecin traitant lors de l’envoie de votre rapport allant atterrir chez un  parfait inconnu !  Et ce n’est ni la secrétaire, ni l’informatique, ni le covid, ni les effectifs et autres excuses à dormir debout qui me feront changer d’avis.

Vous vous avez des week end, des vacances non perturbées, ne sortaient pas la nuit pour aller au chevet d’un malade. Bien sûr il y a les jours de garde. Et alors ?

Que croyez vous ?Avoir choisi une profession de commerçant, ou la vie style métro, boulot, dodo ?

Non vous avez choisi et juré de faire tout pour sauver votre malade même si comme dit Sganarelle :

« les morts, [ont] une honnêteté, une discrétion la plus grande du monde : jamais on n'en voit se plaindre du médecin qui l'a tué”.

Alors cinq minutes à bavarder avec votre patient, ne vous empêchera pas de faire votre travail de praticien même dans un service d’un APHP. 

 

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